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Crimedias

18 décembre 2007

Télévision: Multiplicité sans diversité

Proposé par Pierre N’sana.

Introduction

La démocratisation de la vie politique et la libéralisation de l’espace médiatique congolais qui lui est corollaire, ont favorisé l’implantation de plusieurs stations de radio et de télévision en République démocratique du Congo.  Dans une étude publiée en avril 2004, le Professeur Kayembe a identifié 52 télévisions concentrées dans les principaux centres urbains[1]. Des chiffres qui semblent dépassés aujourd’hui si l’on se réfère aux statistiques de

la Haute

Autorités

des Médias (HAM)[2] qui estiment à 62 le nombre de télévisions (dont 28 pour la seule ville de Kinshasa)[3].

Quelles stratégies adoptent ces médias pour conquérir et fidéliser leurs publics ? Selon quels modèles fonctionnent – ils ? Quels supports techniques utilisent – ils ? Quelles sont les préférences du publics par rapport aux émissions proposées ?..., autant de question qui ont suscité des recherches, scientifiques ou non, menées, sous des angles aussi multiples que divers afin d’appréhender la véritable nature de cette évolution - révolution.

Partant du postulat selon lequel la libéralisation (pris dans le sens de la fin du monopole et de l’ouverture de l’espace médiatique à la concurrence) est un gage du pluralisme du contenu médiatique, nous tenterons, dans cet article, d’évaluer l’incidence de la libéralisation d’avril 1990 sur les programmes des télévisions en République Démocratique du Congo. Il s’agira plus précisément de procéder, à travers une lecture comparée des grilles de programmes,  à un état de lieux du niveau de pluralisme télévisuel à Kinshasa. La portée plutôt limitée de cette étude est guidée par le souci de vérifier la légitimité scientifique du résultat d’une longue observation empirique des habitudes programmationnelle de la télévision congolaise en général et kinoise en particulier, avant de nous lancer, prochainement, dans une tentative d’explication de ce phénomène.

A cet effet, certains outils théoriques et conceptuels empruntés aux théories de la programmation nous seront d’un très appréciable apport. Il s’agit notamment des notions telles que le «découpage horaire», le «temps d’antennes » et le «moment de diffusion» chères à Guy Lochard et essentielles à  la lecture d’une grille de programmes. Ces notions permettront, sans doute, de mieux comparer les choix programmationnels opérés par les télévisions de la Rdc.

Toute fois, face à l’immensité du champ à explorer (28 télévisions pour la seule ville de Kinshasa sur les 62 que compte le pays), nous limiterons notre intérêt à quelques télévisions, parmi les plus regardées, selon le résultat du sondage sur les médias à Kinshasa, publié par le cabinet Expert[4].

Cadre conceptuel.

Il pourrait paraître superflu de se lancer à la vérification du niveau de pluralisme dans un contexte d’opulence télévisuelle telle que souligné ci – haut. Ce sentiment de vanité proviendrait, sans doute, d’une tendance générale et quelque peu généralisée à réduire l’extension de la notion de pluralisme à sa seule dimension technique.

Pourtant, dans son acception la plus extensive, cette notion renvoie à la doctrine d’après laquelle les êtres qui composent le monde sont multiples, individuels, indépendants et irréductible à une substance unique[5]. Cette irréductibilité apparaît encore plus clairement lorsqu’on ajoute, par exemple, les épithètes « politique » et « juridique » au substantif pluralisme. Dans le premier cas, c’est pour désigner un système où sont reconnus les divers organismes représentant les courants de d’opinion, tandis que dans le second, il s’agit de la coexistence de plusieurs systèmes de droit au sein d’un même ordre juridique.

Appliquée à l’objet de la présente analyse, cette interprétation philosophique de base à la société humaine, nous conduit à considérer le pluralisme médiatique, et télévisuel dans ce cas précis, comme la jonction de la pluralité des supports (stations de télévision) et de la diversité des contenus des programmes. La pluralité étant une « réelle réalité » au vu du nombre des télévisions opérationnelles en RDC, c’est de la diversité des contenus dont il sera vraisemblablement question ici. Cette dernière s’entend, tant au niveau de la grille (en terme de formats et des genres d’émissions) qu’à l’intérieur des émissions proprement dites (s’agissant de différents points de vue émanant de toutes les couches et catégories sociales). Comme le fait remarquer Gilbert Maoundonodji s’agissant de la radio[6], si la pluralité des supports est une condition nécessaire, elle n’est pas suffisante pour garantir le pluralisme télévisuel. Un même opérateur, l’Etat ou un privé, peut créer et contrôler plusieurs télévisions, imposer le même contenu des programmes et être le seul pourvoyeur d’informations de culture et de divertissement. On parlera, dans ce cas de figure, d’un pluralisme quantitatif ou numérique qui ne diffère en rien à un régime de monopole.

Ceci étant, la complexité de la communication télévisuelle nous impose d’aborder l’analyse du pluralisme à partir d’un double mouvement empirique puis théorique. Le mouvement empirique nous amènera, d’entrée de jeu, à une lecture comparée des grilles des programmes des télévisions avant de chercher, dans la théorie, les éléments d’explication au constat qui en découlera.

Dans une telle perspective, la grille de programmes nous intéressera de manière particulière, dans la mesure où elle représente, selon Guy Lochard et Henri Boyer, l’instrument par excellence de l’activité[7] de planification par laquelle une télévision organise de rencontres entre ses propres intentions discursives et les attentes supposées de ses téléspectateurs. Elle constitue une prévision plus ou moins détaillée, pour chaque jour de la semaine et pour les différents moments de la journée, répondant au besoin de mise en rapport de deux disponibilités : celle des téléspectateurs  et celle des programmes. Dans ces conditions, son élaboration s’appuiera sur des données d’études sociologiques d’utilisation du temps de loisir, de la présence des individus à domicile, de temps consacré à la télévision…, qui aident à une parfaite articulation du temps social et du temps télévisuel. Comme on peut s’en rendre compte, la confection d’une grille de programme ne peut donc aboutir qu’à une solution de compromis ; qui doit, ce pendant pour être efficient,  offrir les gages d’équilibre et de cohérence. Selon l’analyse de Paul Beaud, Patrice Flichy et Monique Sauvage[8], une grille de programme intervient comme un double garant, pour le téléspectateur. Garant de la diversité, elle sensée répartir dans la journée et la semaine les différents genres et contenus d’émission. Garant de la continuité, elle propose un quadrillage du temps télévisuel, aujourd’hui ininterrompu, articulé autour de plusieurs temps forts, qui divisent la journée en périodes : Day  -time, acces - time, prime - time, second - time.

Ce découpage de la journée en période horaire est mieux explicité par Frédéric Antoine[9] qui préconise que la lecture d’une grille doit se faire verticalement et horizontalement. Dans sa dimension verticale, la grille découpe la journée en  tranches horaire suivant la disponibilité des téléspectateurs devant la télévision. Ces tranches, dont les principales sont le day - time, l’acces - time, le prime - time et le second - time, sont disposées de haut en bas sur la grille de programme.

Frédéric Antoine définit le prime - time comme la période de la plus grosse audience télévisuelle quotidienne [10](situé entre 19 heures et 22 heures aux USA, de 18h

30’

à 21h

30’

en France, plus tard en Espagne et plutôt en Grande Bretagne) dont l’offre vise à fédérer le plus large public possible.  Car, explique Lucien Sfez
[11], durant le prime - time, c’est un public varié et populaire qui regarde la télévision en famille.

La pratique montre, quant à elle, que la gestion du prime - time diffère en fonction des missions que s’assigne chaque station de télévision. Dans le cas (quelque peu idéaliste) des télévisions sans ressources publicitaires, il représente le moment d’assumer la vocation de service publique en permettant un large accès aux publics le plus diversifiés. Pour les télévisions à vocation commerciale, il est le moyen de rendre les audiences «isomorphes » à celle des visées par les annonceurs afin de justifier  les tarifs des créneaux publicitaires.

A l’opposé, le day - time et le second - time, au nom d’une segmentation en public spécifique (jeune, femme au foyer, personne de troisième age, etc.) comporteront essentiellement des émissions ciblées.  La programmation de l’acces - time est conçue, quant à elle, pour fédérer progressivement autour d’un public - noyau la plus large audience : celle du prime - time.

Toute fois, ce découpage est fonction de l’agglomération d’un public varié étant donné que les emplois du temps de différentes catégories diffèrent. Les limitations temporelles des différentes tranches varient également selon les pays, les villes, les saisons, les jours de la semaine, etc.

Les études menées sur les habitudes de consommation de la télévision à Kinshasa[12] permettent de situer le prime time entre 18h

30’

et 21h 30’ en semaine et de 19h00 à 22h30’ le week-end. Cette tranche nous intéressera particulièrement dans notre lecture comparée des grilles de télévisions.

Pour clore ce chapitre, reprécisons que l’analyse du pluralisme télévisuel ne doit pas seulement s’appliquer à la grille des programmes. Elle doit, pour être complète, s’étendre aux différents genres contenus dans celle - ci. Bernardo Amigo Latorre soutient même à ce propos que l’outil qui permet à une chaîne de télévision d’agir sur le téléspectateur et à ce dernier de comprendre le statut du discours véhiculé par une émission en particulier, c’est le genre[13].

Toutes fois, nous avons choisi, pour des raisons présentées en introduction, de ne pas succomber à la tentation de procéder à l’évaluation du pluralisme à l’intérieur des différents genres, ce qui mériterait plus d’un article. Il nous semble plus pertinent de limiter notre intervention à la grille de programme au nom de la présomption, à l’origine du processus d’élaboration de cet outil, de l’existence d’une intentionnalité communicationnelle. Poursuivant dans cette même logique, les différentes émissions seront regroupées en quatre principales catégories (et non selon les genres) que sont Information (le JT dans ses multiples formes), Publicité (y compris celle contenue dans des émissions sponsorisées), Divertissement (film, théâtre, variétés, jeu, talk show, …), Documentaire et Magazine (toute autre émission de plateau ne faisant partie des catégories pré – citées). C’est la confrontation entre ces catégories, tant en terme de moment de diffusion qu’en celui de temps d’antenne, que sera déterminé le niveau de pluralisme.

Construction de l’univers de recherche

Pour cette étude, nous avons choisi d’analyser les programmes de quatre chaînes de télévision les plus regardées, selon le dernier sondage réalisé par le cabinet Experts. Ces chaînes ont également l’avantage d’offrir la possibilité de comparer les stratégies programmationnelles des deux différents types qui dominent le paysage audiovisuel congolais, à savoir télévisions publique et commerciales. Bien plus, l’expérience acquise par ces chaînes (RNTC 40 ans, AA 15 ans et RAGA, 10ans) leur a permis de se positionner comme des modèles sur base desquels leurs sœurs et non moins concurrentes nouvellement crées, calquent leurs stratégies de programmation respectives. Toute fois, l’idée de départ était d’y associer, pour faire complet, les télévisions dites confessionnelles ou religieuses de plus en plus nombreuses. Mais notre effort à vouloir reconstituer les grille de programmes, non disponibles auprès des ces chaînes, par un travail de monitoring quotidien s’est avéré vain, suite à des interruptions et changements ou modification fréquemment opérés en plein milieu d’émissions.

D’autre part, l’analyse des grilles de programmes concernera particulièrement deux tranches horaires : le prime – time et le day – time. Le premier, avons – nous dit, à l’avantage de fédérer autour de lui un public varié et populaire, tandis que le second vise un public spécifique. La stratégie déployée par les chaînes dans la gestion de ces tranches horaires demeure profondément révélatrice de la philosophie générale de leur programmation.

Etat de lieux de la programmation du Prime - time

Lundi (légende)[14]

Tranches

RTNC

Antenne A

Raga TV

Tropicana

18h00’

Infos (en langue)

Business Africa

Série

Sketch

19h00’

Infos (les titres)

Journal télévisé

Actu (JT)

Journal (JT)

19h03’

Sports

19h30

Pub

Pub

19h50’

Pub

Pub

20h00’

Le Journal

Rendez-vous

20h05’

Variétés musicales

20h30’

Pub-messages-

Théâtre Lis boy fondation

Théâtre les abeilles

21h00’

Vivement Elections

Infosport (Mag)

21h30

Sportissimo (mag)

Téléfilm

La lecture de ces grilles révèle que les différentes chaînes de télévision proposent, à 19h00’, des éditions d’information et que celles – ci sont à chaque fois suivies des tranches publicitaires. Le prime – time, reste dominé par une forte présence de la Publicité qu’on retrouve entre 20h30 et 21h00 sur toutes les chaînes, soit dans une tranche ad hoc, soit dans des programme de Divertissement ou de Magazines sportifs sponsorisés. Toutes fois la RTNC se démarque quelque peu des autres en encadrant les deux tranches de publicité placées avant et après sa grande édition du journal par deux magazines. La RTNC arrive en tête des programmes d’information avec 93 minutes, suivi de Tropicana 50 minutes et de Raga et Antenne A avec30 minutes chacune. Cette tendance reste inchangée de lundi ç vendredi. Raga et RTNC proposent respectivement 90 et 77 minutes des magazines dont deux (en raison d’un par chaîne)  consacrés au sport sont sponsorisés (par une même marque). Pour leur part, Antenne A et Tropicana consacrent une bonne partie du  prime – time au divertissement (AA 60min et Tropicana 150minutes) fortement parqué par la publicité.

Mardi

Tranches

RTNC

Antenne A

Raga TV

Tropicana

18h00’

Infos (en langue)

Monde du Droit

Série

Dessin animé

19h00’

Infos (les titres)

Journal télévisé

Actu (JT)

Journal (JT)

19h03’

Tribune des femmes

19h30

Pub

Pub

19h50

Pub

Pub

20h00’

Le Journal

Théâtre Simba

Théâtre Afrik’Art

20h05’

Sketch ping pong

20h30’

Pub-messages-

21h00’

Maintenant la police

Top 10

RDV des Stars

Sportropic

21h30

Pub

Téléfilm

L’information se maintient à 19h00’ sur les quatre chaînes et la publicité avec. A l’exception de la RTNC, les autres chaînes proposent à leurs téléspectateurs, entre 20h00’ et 21h00’ des télés dramatiques (ou théâtre populaire) fortement marquées par des messages publicitaires. A partir de 20h30’ la chaîne publique rejoint les autres avec la diffusion de la publicité pendant 30 minutes avant de proposer le magazine de la police nationale. En terme de temps d’antenne, l’information garde son volume horaire tandis que le divertissement gagne du terrain (AA 90min, Raga 150 min) avec une toute aussi forte présence publicitaire. Seule la RTNC résiste en maintenant deux magazines à vocation éducative avant et après le journal.

Mercredi

Tranches

RTNC

Antenne A

Raga TV

Tropicana

18h00’

Infos (en langue)

Prédication

Série

Prédication

19h00’

Infos (les titres)

Journal télévisé

Actu (JT)

Journal (JT)

19h03’

Mélodies divines

19h30

Pub

Pub

19h50’

Pub

Pub

20h00’

Le Journal

A cœur ouvert

Regards croisé

20h05’

Théâtre les abeilles

20h30’

Pub-messages-

21h00’

Horizon mondial

Théâtre S. soucis

Théâtre Evangeliste

21h30

Pub

Théâtre sens unique

L’information se maintient à 19h00’ sur toutes les chaînes tandis que le divertissement et la publicité viennent clôturer le prime time.  Antenne A et Raga proposent les mêmes types d’émissions (60min magazine te 60min divertissement) de 19 à 21h30 et sont rejoint par Tropicana à partir de 20h05’, avec 85 min de divertissement. Antenne A et Tropicana réservent la première heure du prime – time à la prédication d’un même pasteur moyennant payement (d’où le rouge sur la dernière lettre), tandis que le divertissement fait son entrée sur la grille de RTNC. Toute fois, cette dernière maintient l’information en tête du temps d’antenne avec 93 minutes, alors que les trois autres font la part belle au divertissement sponsorisé.

Jeudi

Tranches

RTNC

Antenne A

Raga TV

Tropicana

18h00’

Infos (en langue)

Art et tourisme

Série

Dessin animé

19h00’

Infos (les titres)

Journal télévisé

Actu (JT)

Journal (JT)

19h03’

Sports

19h30

Pub

Pub

19h50’

Pub

Pub

20h00’

Le Journal

Théâtre Pléiades

20h30’

Pub-messages-

Théâtre Ngadiadiai

Théâtre kilimajaro

21h00’

Théâtre

Europa live

21h30

pub

Célébrité 100%

La lecture comparée des grilles pour cette journée vient corrobore la thèse de l’uniformité des programmes. En plus des éditions d’information programmées à 19h00,  toutes chaînes offre aux publics, à partir de 20h30’, du divertissement, à travers des télé – dramatiques (et un peu plus tard de la variété) fortement  marquées par la publicité. Même la RTNC renonce à sa stratégie de faire encadre le JT par deux magazine à vocation éducative. Le temps d’antenne réservé à l’information reste le même, pendant que le divertissement gagne du terrain.

Vendredi

Tranches

RTNC

Antenne A

Raga TV

Tropicana

18h00’

Infos (en langue)

Sport

Série

Dessin animé

19h00’

Infos (les titres)

Journal télévisé

Actu (JT)

Journal (JT)

19h03’

Qu’on se le dise

19h30

Pub

Pub

19h50’

Pub

Pub

20h00’

Le Journal

Théâtre Lis boy

Energie et reconstruction

20h30’

Pub-messages-

Sketch ping pong

21h00’

2 sons de cloche

Chez Francis

Maxi foot

21h30

Sportissimo (mag)

Prédication

Pas de changement au niveau de l’information, tant du point de vue du moment de diffusion que de temps d’antenne. Par contre le Divertissement régresse quelque peu au profit des Magazines. On note toute fois une forte présence de la publicité.

Samedi          

Tranches

RTNC

Antenne A

Raga TV

Tropicana

19h00’

Infos (les titres)

Journal télévisé

Actu (JT)

Journal (JT)

19h03’

Bonsoir, Bon week-end

19h30

Pub

Pub

19h50’

Pub

Pub

20h00’

Le Journal

Modes & moeurs

Théâtre Saï-saï

20h30’

Pub-messages-

Théâtre les abeilles

21h00’

Mosaïque

Détente musicale

22h00’

Pub-messages-

Variétés congolaises

Impact

Ouragan

22h15’

Variétés Samedi soir

22h30’

La journée de samedi, le prime est dominé par la détente. On note une forte présence des  émissions de Divertissement qui combinent le théâtre et la détente musicale. Et même les quelques magazines proposés par la RTNC et Antenne A sont présentés sur un ton très récréatif. L’Information n’occupe que 30 et 33 minutes de l’antenne au profit du divertissement et de la publicité. On peut également, s’agissant du moment de diffusion, observer qu’à 21h00’ la RTNC et Antenne A  proposent des magazines (par ailleurs très récréatifs) pendant que Raga et Tropicana offrent du « théâtre populaire ». A 22h00’ les chaînes commerciales diffusent des variétés musicales et sont rejointes à partir de 22h15’ pas la télévision publique jusqu’à la fin du prime – time.

Dimanche       

Tranches

RTNC

Antenne A

Raga TV

Tropicana

19h00’

Infos (les titres)

Journal télévisé

Fiscalité & Dvlpt

Rétro info hebdo

19h03’

Emission des Forces armées

19h30

Pub

Pub

19h50

Pub

Pub

20h00’

Le Journal

Beauté Plus

Studio maximum

Hit Tropic

20h30’

Pub-messages-

Droit à la parole

21h00’

Mega - Sports

Carnet de santé

Prédication

21h35

Théâtre Muyombé

22h00’

Droit de savoir

Théâtre

Java soirée

22h15’

22h30’

Dimanche, l’Information poursuit sa régression en terme du temps d’antenne. Tropicana réduit de 30 minutes la duré de son journal télévisé alors que Raga (dont toutes les émissions sont sponsorisées) préfère « rentabiliser » l’espace - info en plaçant à 19h00’ un magazine sponsorisé. Le divertissement vient clôturer le prime time dans les chaînes commerciales, alors que la chaîne publique termine avec un magazine très semblable à celui proposé par Antenne A à 20h30’.

Synthèse sur la programmation du prime time

  1. Le moment de diffusion

La lecture comparée de ces grilles relève que la structure des programmes des chaînes commerciales reste la même. Les Informations à 19h00 (en semaines) sont suivies, par une tranche publicitaire, puis par des programmes (divertissement ou magazine) très souvent sponsorisés. Cette tendance est également observable, quoique dans une moindre mesure, à la télévision publique qui, seule, place son journal à 20h, en le faisant encadrer (comme ses consoeurs) par des tranches publicitaires. Le samedi, l’uniformisation se renforce à partir de 22h00’ avec de la détente sur la quasi-totalité des télévisions.

Partant de cette lecture, le programme - type des télévisions kinoises peut se présenter comme suit :

En semaine :

-          19h00’ : Information (sur toutes les chaînes)

-          19h50’ : Publicité (sur toutes les chaînes)

-          21h00’ : Divertissement (à l’exception de la RTNC)

Samedi

-          19h00’ : Information

-          19h50’ : Publicité

-          22h00’ Variétés

Dimanche

-          19h50’ : Publicité

  1. Le temps d’antennes

Le calcul du temps d’antenne par catégorie d’émission place l’information largement en tête sur la télévision publique, sans doute à cause de l’exigence de  diffuser les informations dans toutes les langues nationales. Sur les chaînes commerciales, le théâtre dit populaire et les variétés musicales placent le divertissement en tête. La publicité occupe des tranches quotidiennes stables d’au moins  30minutes ainsi qu’un bonne part des émissions sponsorisées.

Etat de lieux de la programmation du Day – time

Avant de poursuivre notre analyse, rappelons que le day - time correspond, comme son nom l’indique, à la journée, soit la plus grande partie de la grille. Mais à la suite de  flottement constatées dans la période comprise entre 13 et 17h, sur les grille mises à notre disposition par les différentes chaînes*, nous présenterons ici les programmes proposés dans l’avant midi, plus précisément dans la tranche 9 à 12 heures.

Du lundi à Samedi

Tranches

RTNC

Antenne A

Raga TV

Tropicana

9h00

Tôt  gaieté

Fiction

Théâtre

News

9h30

Info en langue

9h40

Tôt  gaieté

Théâtre ping pong

10h00’

Info en français

Flash info

Wake up/ Salut week-end

10h15

L’invité

Thé le matin

10h30

Infos en langue

10h45

Séquence du jour

Club de la presse/ Matinée tropicale

11h00

Sport au passé/ Sankaï cadence

Bulletin d’info

11h15

Wake up/Salut week-end

11h30

11h35

Haki ya kupahano

Télé film

12h00

Midi culture

Flash info

Europa en live

Pendant toute la semaine, les programmes matinaux des chaînes de télévision kinoise proposent majoritairement du divertissement, dominés par des tranches d’animation libre. L’information intervient soit en rediffusion (le cas de tropicana), soit sous forme de flash à l’intérieur de ces tranches. Comme pour le Prime time, la RTNC se démarque, quelque peu, en proposant de magazines culturels (10h 45’ et 11h15’) et de développement (11h35’). On peut également relever l’absence de la publicité sur toutes les grilles.

Dimanche

Tranches

RTNC

Antenne A

Raga TV

Tropicana

9h00

Religion

Fiction

Religion

News

9h30

Animation

9h40

Théâtre ping pong

10h00’

Salut week-end

10h15

Sport

10h30

10h45

Théâtre Kilimanjaro

11h00

Echo d’europe

Femme & société

11h15

11h30

11h35

12h00

Karibu Variété

Station One

Jardin d’Elen

La RTNC et Raga proposent le même menu pour la journée de dimanche, en passant, sans transition de la religion au divertissement. Elles y retrouvent Tropicana qui a jugé bon d’ouvrir cette tanche par une rediffusion de son journal télévisé. Pour la première fois, une chaîne (Antenne A) se démarque totalement des autres. Elle propose plutôt deux magazines dont un sponsorisé.

Synthèse sur la programmation du Day  - time

  1. Le moment de diffusion

Pendant toute la semaine, toutes les chaînes ont opté pour  les tranches d’animation matinale ; des programmes – bus, à l’intérieur desquels sont placés d’autres petits programmes et où l’animateur joue le rôle de régulateur de la parole et du temps. Dans ces conditions, le choix du téléspectateur n’est plus vraiment entre tel ou tel autre contenu de programme mais plutôt entre tel (le) ou tel (le) autre animateur (trice). 

  1. Le temps d’antenne

Pour ce qui est du temps d’antenne, le Divertissement se place loin devant toutes les autres catégories, y compris dans la télévision publique, ce aussi bien en semaine que le pendant le week-end.

Conclusion

Cette brève analyse montre que la multiplication des chaînes de télévision qui a suivi de la démocratisation de la vie politique en République Démocratique du Congo ne s’est pas fait accompagnée d’une diversification des contenus. Le nombre de télévisions a sensiblement augmenté depuis un quart de siècle, mais la création dans ce secteur a surtout contribué à n’augmenter que le contenu de divertissement et du temps attribué à la publicité sous ses différentes formes. Le théâtre dits populaire et les émissions de variétés musicales s’éternisent sur les écrans de télévision, laissant très peu d’espace à l’information et aux autres formats. Les programmes sont de plus en plus envahis par la publicité, y compris les magazines, dont la plupart sont des émissions de plateau. Les reportages et Documentaires, par exemple, semblent avoir été jugés indignes de figurer dans les prévisions des chaînes de télévision pour le prime – time et le day – time.

La lecture comparée des grilles de programmes effectuée ci-dessus a permis donc de mettre en évidence non seulement l’uniformité des intentions communicationnelles des différentes chaînes de télévisions, mais aussi et surtout une tendance à pratiquer ce que je qualifierais de « programmation par mimétisme » : les mêmes émissions aux mêmes heures, un peu comme le fait l’autre, et à rechercher, à tout prix, un consensus contre ce qui pourrait diviser. Même la chaîne publique semble se retrouver face à un dilemme : doit – elle entrer, complètement, dans la danse, au risque de se détourner de sa vocation et ainsi perdre son identité ? Ou bien jouer la carte de la différence, au risque de perdre son audience. Les raisons à la base d’une telle situation méritent bien d’être fournies un jour.

Index Bibliographique

1.      Antoine. F, Les programmes coincés dans une grille, in Médiacteurs tout savoir sur la télévision, Bruxelles, 1990.

2.      Beaud, P, Flichy P et Sauvage. M ; Géomètre contre saltimbanque : la prédominance de la programmation dans la télévision française, in  Réseaux, Sociologie de la télévision : Paris, CENT, numéro hors série, 1991

3.      Experts sprl ; Sondage sur les médias à Kinshasa, Kinshasa, 21ième édition, octobre 2005 44p.

4.      Kayembe, A ; Situation des médias en RDC, Kinshasa, Institut Panos Paris, 2005

5.      Latorre. B A, Le genre comme outil d’interprétation en réception : le cas des télé – séries chiliennes, in Genres et culture des masse, volume III, n° 1, décembre 2003.

6.      Lochar, G et Boyer. H ; Notre écran quotidien ; une radiographie du télévisuel, Paris, Dunos, 1995, 203 p.

7.      Maoundonodji, G ; Afrique centrale : Cadres juridiques et pratique du pluralisme radiophonique,  Paris, Karthala, 2005,  250 p.

8.      Missika, JL ; La fin de la télévision, Paris, Seuil, 2006, 107p

9.      Sfez, L ; Dictionnaire critique de la communication, Tome II, Paris, PUF, 1993


[1] Kayembe, A ; Situation des médias en République Démocratique du Congo, Kinshasa, Institut Panos Paris, 2004, p8

[2] Institution de la transition Rd congolaise, chargée de la régulation des médias

[3] Source : Centre d’écoute et de monitoring de la presse congolais ; Cartographie des médias en RDC, document inédit

[4] Experts sprl ; Sondage sur les médias à Kinshasa, Kinshasa, 21ième édition, octobre 2005, p5

[5] Maoundonodji, G ; Afrique centrale : Cadres juridiques et pratique du pluralisme radiophonique, Paris, Karthala, 2005, p. 21

[6] Idem, p 22

[7] Lochar, G et Boyer. H ; Notre écran quotidien ; une radiographie du télévisuel, Paris, Dunos, 1995, p95

[8] Beaud, P, Flichy P et Sauvage. M ; Géomètre contre saltimbanque : la prédominance de la programmation dans la télévision française, in  Réseaux, Sociologie de la télévision : Paris, CENT, numéro hors série, 1991.

[9] Antoine. F, Les programmes coincés dans une grille, in Médiacteurs tout savoir sur la télévision , Bruxelles, 1990, p 115.

[10] Antoine F, op cit

[11] Sfez, L ; Dictionnaire critique de la communication, Tome II, Paris, PUF, 1993, p 1032

[12] Experts, Cabinet d’étude et conseils ; Sondage sur les médias à Kinshasa, Kinshasa, 21è édition, p 5

[13] Latorre. B A, Le genre comme outil d’interprétation en réception : le cas des télé – séries chiliennes, in Genres et culture des masse, volume III, n° 1, décembre 2003

[14] : Informations,  : Publicité,  : Magazine, : Divertissement, La couleur rouge associée à une autre couleur (, ou ) renvoie à une émission sponsorisée (magazine ou divertissement) avec une forte présence de la publicité

* Les programmes présentent des moments creux sans indications précises. Ex. 12h 00’ : Chez Francis, 16h 00’ célébrité 100%, la première émission n’ayant qu’une durée d’1h30’.

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